Le ministre des Finances du Québec, Éric Girard, a présenté le cinquième budget du gouvernement de la CAQ, le 21 mars 2023. Ce budget (Budget 2023–2024) vise notamment certains champs d’action spécifiques, soit : les questions économiques, notamment liées à l’inflation et l’instabilité persistante et la pénurie de main-d’œuvre, des changements au Régime des rentes du Québec afin de favoriser le maintien en emploi des travailleurs âgés de 65 ans, de même que des mesures visant à rendre le réseau de la santé plus performant et humain.
Ce communiqué résume sommairement, sans commentaires de notre part, les principales mesures annoncées à ce sujet.
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Plan budgétaire 2023-2024 du gouvernement du Québec
Bilan économique et finances publiques
La croissance économique du Québec est estimée à 2,8 % (produit intérieur brut réel – PIB) en 2022, soit un taux très près de celui qui avait été anticipé lors du dépôt du Budget 2022-2023 de mars 2022; le ministre des Finances du Québec prévoyait pour 2022 une croissance de 2,7 %. Pour 2023 et 2024, le ministre table sur une croissance du PIB réel de 0,6 % et 1,4 %; la hausse des taux d’intérêt et une inflation plus élevée viendront peser sur la croissance économique au Québec et à l’échelle mondiale, particulièrement en 2023.
Le niveau élevé d’inflation que nous avons connu au Québec en 2022 (6,7 %), ainsi qu’ailleurs dans le monde, demeure un facteur de risque au niveau des prévisions économiques du ministre, malgré un recul récent des tendances inflationnistes. Le niveau actuel d’inflation demeure supérieur à la fourchette d’inflation fixée par la Banque du Canada, rendant toujours possibles d’autres hausses de taux d’intérêt, malgré huit hausses du taux directeur de la Banque du Canada. En guise de rappel, depuis l’instauration d’une politique visant à contrôler l’inflation par la Banque du Canada et le gouvernement fédéral en 1991[1], nous avons vécu dans un régime de faible inflation. Cette politique visait une inflation entre 1 % et 3 %, avec un point médian de 2 % à long terme. Force est de constater que l’inflation navigue depuis maintenant plus d’un an à des niveaux beaucoup plus élevés. Le taux annuel d’inflation est passé de 0,8 % en 2020 à 3,8 % en 2021 et à 6,7 % en 2022 (dans son budget de l’an dernier, le ministre avait prévu une inflation de 4,7 % pour 2022). Le plan budgétaire de cette année prévoit une inflation annuelle moyenne de 3,5 % en 2023 et de 2,2 % en 2024. Plusieurs facteurs expliquent le retour de l’inflation : les ruptures dans les chaînes d’approvisionnement liées à la COVID-19, la hausse du prix de l’énergie et des denrées alimentaires suivant l’invasion de l’Ukraine par la Russie et un niveau des taux d’intérêt maintenu trop longtemps trop bas pendant la pandémie, ce qui a conduit à une demande excédentaire à l’offre.
[1] Cette politique a été reconduite jusqu’en décembre 2026.
De son côté, le marché de l’emploi est demeuré très vigoureux en 2022. Le taux de chômage annuel moyen est passé de 6,1 % en 2021 à 4,3 % en 2022 (sur base d’une moyenne annuelle). Le plan budgétaire prévoit une hausse du taux de chômage pour 2023 à 4,6 %, en raison du ralentissement économique causé par les hausses des taux d’intérêt. Au moment du dépôt du budget, le taux de chômage était de 4,1 % (donnée de février 2023). En moyenne annuelle, le Québec a enregistré 111 700 emplois de plus en 2022 par rapport à 2021, ce qui représente une croissance de l’emploi de 2,6 %.
Pour l’année financière 2022-2023 prenant fin le 31 mars 2023, le solde budgétaire de la province sera déficitaire de 5 milliards, montant qui prend en considération un versement de 3,4 milliards au Fonds des générations. En considérant l’utilisation de 450 millions provenant de la réserve de stabilisation, le déficit est de l’ordre de 4,6 milliards.
Pour la prochaine année (2023-2024), le solde sera déficitaire de 4 milliards, dont un versement de 2,4 milliards au Fonds des générations. Le retour à l’équilibre budgétaire est toujours prévu pour 2027-2028. Au 31 mars 2023, la dette brute s’établira à 222,6 milliards, soit à 40,2 % du PIB, ce qui représente un niveau inférieur à celui d’avant la pandémie (43,5 %). Le poids de la dette brute devrait demeurer relativement stable au cours des années qui viennent, pour s’établir à 40,6 % du PIB au 31 mars 2028, ce qui est en deçà de l’objectif de 45 %.
Une mesure phare du plan budgétaire est une réduction de l’impôt des particuliers pour les deux premières tranches des paliers d’imposition. Cette baisse d’impôt sera financée par une croissance plus modérée des versements au Fonds des générations.
Adapter le Régime de rentes du Québec aux nouvelles réalités des Québécois
En février dernier, on se rappellera que le gouvernement du Québec a mené une consultation publique sur le Régime de rentes du Québec (RRQ) afin d’examiner des pistes de réflexion qui permettront d’accroître, à court et à moyen terme, la sécurité financière des Québécois. Cette consultation a permis de reconnaître qu’il y a un large consensus selon lequel :
- Il est généralement préférable pour un travailleur de retarder le versement de la rente de retraite du RRQ afin de s’assurer d’une meilleure sécurité financière à la retraite;
- Une hausse de l’âge minimal d’admissibilité à la rente de retraite ainsi que des facteurs d’ajustement pour retraite anticipée pourraient pénaliser les particuliers les plus vulnérables;
- Les travailleurs de 65 ans ou plus :
- Désirent conserver une part plus importante de leur salaire lorsqu’ils bénéficient déjà d’un revenu de retraite;
- Ne veulent pas être pénalisés sur leur rente future de retraite parce qu’ils continuent de travailler à temps partiel.
- Les participants doivent être mieux informés sur les avantages de reporter le versement de leur rente de retraite;
- Le RRQ doit mieux reconnaître les situations particulières, notamment celles des personnes invalides, des familles et des personnes proches aidantes.
Au terme des consultations publiques sur le RRQ, le gouvernement avait indiqué que, bien qu’il fût d’avis qu’une hausse de l’âge minimal d’admissibilité à la rente de retraite du RRQ constituerait une solution avantageuse face aux risques d’inflation, de longévité et de rendement auxquels sont confrontés les retraités, ce changement aurait un impact important sur la marge de manœuvre financière du RRQ, ce qui limiterait les autres améliorations qui pourraient être apportées au régime. En conséquence, il est donc annoncé dans le Budget 2023-2024 qu’il est préférable d’utiliser, de façon prioritaire, la marge de manœuvre disponible afin :
- D’encourager le maintien en emploi des travailleurs de 65 ans ou plus. Des modifications seront apportées au RRQ dès le 1erjanvier 2024 afin de prévoir la possibilité de cesser les cotisations au RRQ pour les bénéficiaires d’une rente de retraite de 65 ans ou plus. Cette cessation de cotisation sera applicable à la fois pour le salarié et l’employeur. De plus, le régime sera également modifié afin que les cotisations au régime pour un salarié et l’employeur cessent d’être payées à la fin de l’année ou le salarié atteint l’âge de 72 ans;
- De protéger la rente pour les travailleurs de 65 ans et plus. Afin d’aider les travailleurs à améliorer leur sécurité financière à la retraite sans augmenter l’âge minimal d’admissibilité à la rente de retraite du RRQ, des modifications seront faites au RRQ, avec effet au 1erjanvier 2024, afin de prévoir la mise en place d’une protection de la rente pour les travailleurs de 65 ans et plus gagnant un revenu inférieur à leur moyenne de gains en carrière.
Le gouvernement annonce également dans le Budget 2023-2024 différentes mesures visant à permettre de reporter davantage le versement de la rente de retraite du RRQ et à mieux informer les futurs retraités. À cette fin, le gouvernement annonce dans le présent Budget 2023-2024 :
- L’augmentation de l’âge maximal d’admissibilité à une rente de retraite de 70 à 72 ans dès le 1erjanvier 2024;
- Son intention de revoir les communications de Retraite Québec avec sa clientèle afin de mieux informer les cotisants au RRQ sur les avantages de reporter le versement de la rente de retraite;
- Son intention de lancer des travaux afin de mieux reconnaître certaines situations particulières dans le cadre du RRQ.
Autre élément à mentionner est le fait que le gouvernement précisera également le mécanisme d’ajustement applicable au régime supplémentaire du RRQ dans le cas d’un déséquilibre financier.
L’ensemble de ces mesures devront également faire l’objet de mesures législatives avant de pouvoir entrer en vigueur au 1er janvier 2024.
Faire face à la pénurie de la main-d’œuvre
Dans un contexte de vieillissement démographique et de pénurie de main-d’œuvre, le Budget 2023-2024 indique qu’un appui à l’intégration des personnes immigrantes au marché du travail ainsi qu’un meilleur arrimage entre les compétences détenues par les travailleurs et les besoins des employeurs permettront de stimuler la croissance économique.
Afin de faire face à la pénurie de main-d’œuvre, le gouvernement annonce, dans le cadre du Budget 2023-2024, plusieurs initiatives totalisant 615,2 millions sur six ans et visant notamment à :
- Appuyer l’intégration socioéconomique des personnes immigrantes;
- Soutenir les entreprises dans leur recherche de travailleurs.
Rendre le réseau de la santé plus performant et plus humain
Dans la foulée des initiatives lancées dans le cadre du Plan pour mettre en œuvre les changements nécessaires en santé, déposé lors du Budget 2022-2023 en mars 2022, le gouvernement annonce qu’il poursuivra la transformation du système de santé afin de rehausser les soins et services à la population.
Des investissements de près de 5,6 milliards d’ici 2027-2028 sont prévus pour rendre le réseau de la santé plus performant et plus humain, notamment :
- 3,0 milliards pour rendre le système de santé plus efficace et plus flexible pour la population;
- 2,0 milliards pour prendre soin des aînés et des personnes proches aidantes;
- 565,4 millions pour soutenir les personnes plus vulnérables.
De plus, pour les années 2023-2024, les dépenses en santé et services sociaux atteignent maintenant 59,0 milliards. Elles se déclinent en trois grands axes d’intervention :
- Les services offerts à la population par des programmes de services directs ou de soutien;
- Les programmes sous la responsabilité de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ);
- Le financement des infrastructures et de diverses activités connexes.
Fait à noter : Le financement des dépenses en santé et services sociaux provient en grande partie d’impôts et de taxes généraux, mais aussi de contributions externes, notamment du gouvernement fédéral et des usagers.